« Police », le dernier film d’Anne Fontaine, adapté du livre d’Hugo Boris, sort en salle aujourd’hui, 2 septembre.


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C’est l’occasion pour moi, en cette fin d’été, de poursuivre la reproduction d’articles anciens qui mettent les événements en perspective et aident à comprendre l’actualité.

Le 22 octobre 2016, j’avais consacré mon article à «  Police « , le livre d’Hugo Boris (éd. Grasset 17.50 € – EAN : 9782246861447). Je recommandais, en ces termes, la lecture de ce roman au moment où un certain nombre de policiers exprimaient, déjà, à juste titre, leur exaspération.

«  Police « , le dernier livre d’Hugo Boris

Après Trois grands fauves, (éd. Belfond 2013), Hugo Boris a publié Police (éd. Grasset 17,50 € – EAN : 9782246861447), le 24 août 2016.

Le 27 août 2013, dans ce blog, j’avais écrit tout le bien que je pensais de Trois grands fauves. Le portrait qu’il faisait de Danton, Hugo et Churchill, dans ce roman, était à la fois original et saisissant. Ces trois prédateurs « ont en commun d’avoir été confrontés très tôt à la mort, d’avoir survécu et d’y avoir puisé une force dévorante. Trois survivants qui ont opposé leur monstruosité à la faucheuse. »

Hugo Boris, dans un style très intéressant, évoque, dans ce livre, la personnalité de ces trois hommes au caractère bien trempé. La laideur de Danton qui explique sans doute son inimaginable caractère, la puissance qu’il développait. Le grand Hugo, qui, après le destin tragique de son enfant, s’adonnait au spiritisme. Quant à Churchill, j’écrivais dans mon article que « sa rencontre manquée avec Hitler et son séjour dans la cave de l’hôtel de Paris à Monte Carlo en octobre 1945, étaient tout simplement de pures merveilles de littérature. Quel style et quelle imagination ! »

Hugo Boris est jeune. Il a trente-sept ans. Il est diplômé de l’Institut d’études politiques de Bordeaux et de l’École nationale supérieur Louis Lumière. En dehors des deux livres dont je viens de parler, il est l’auteur de : Le Baiser dans la nuque, Belfond, 2005 (lauréat du prix Emmanuel-Roblès) ; La Délégation norvégienne, Belfond, 2007 (lauréat du premier prix littéraire des Hebdos en région) ; Je n’ai pas dansé depuis longtemps, Belfond, 2010 (lauréat du prix Amerigo Vespucci 2010). Hugo Boris a également réalisé une dizaine de films courts et a travaillé comme assistant réalisateur sur des documentaires.

Hugo Boris

Non seulement Hugo Boris a un style, mais il aborde, avec talent, la condition humaine dans des univers très différents et peu connus. Dans l’espace, avec Je n’ai pas dansé depuis longtemps, le destin, dans Trois grands fauves, et maintenant la police. Il n’avait sans doute pas imaginé que l’actualité contribuerait à la promotion de son livre.

Grasset présente ainsi son dernier livre : Police :

« Ils sont gardiens de la paix. Des flics en tenue, ceux que l’on croise tous les jours et dont on ne parle jamais, hommes et femmes invisibles sous l’uniforme.

Un soir d’été caniculaire, Virginie, Érik et Aristide font équipe pour une mission inhabituelle : reconduire un étranger à la frontière. Mais Virginie, en pleine tempête personnelle, comprend que ce retour au pays est synonyme de mort. Au côté de leur passager tétanisé, toutes les certitudes explosent. Jusqu’à la confrontation finale, sur les pistes de Roissy-Charles-de-Gaulle, où ces quatre vies s’apprêtent à basculer.

En quelques heures d’un huis clos tendu à l’extrême se déploie le suspense des plus grandes tragédies. Comment être soi, chaque jour, à chaque instant, dans le monde tel qu’il va ?

Comment exercer un métier impossible, faire respecter l’ordre sans se renier soi-même ? Dans ce roman d’une formidable efficacité dramatique, Hugo Boris condense en quelques heures d’un huis clos tendu à l’extrême une histoire qui embrasse les choix personnels les plus profonds et la responsabilité collective la plus vaste. »

L’éditeur offre la possibilité de lire un extrait sur son site : Police – Hugo Boris – Grasset

Dans ce monde de violence et d’immédiateté, Hugo Boris aborde la condition humaine, la condition des femmes, les sentiments que peuvent éprouver les policiers, avec beaucoup de talent et un langage de vérité.

Je recommande la lecture de ce livre au moment où un certain nombre de policiers expriment leur exaspération et s’invitent dans la campagne présidentielle.

La vie quotidienne des policiers est difficile.

Quatre ans plus tard, Anne Fontaine, réalisatrice, scénariste, présente une adaptation du roman d’Hugo Boris assez réussie. Éric Neuhoff, dans Le Figaro, trouve du « Simenon » dans cette adaptation. C’est un compliment ! Télérama est plus critique. Guillemette Odicino a beaucoup aimé le « regard franc, d’Anne Fontaine qui a mis dans son film, une tendresse consolatrice. Au-delà de la police, son film tend la main à toutes les vies difficiles. Et il y en a beaucoup ! » Il regrette cependant que la réalisatrice ait perdu « son mordant et s’englue dans une réalité dramatique où elle confond chronique d’un métier harassant et anecdotes insignifiantes. Sans parler de certaines séquences — l’accès, comme par magie, de ces policiers ordinaires à des zones interdites — contredisant son parti pris de réalisme. Il a moins aimé « qu’Anne Fontaine mette tout sur le même plan : les états d’âme de l’héroïne sur sa liaison avec son collègue et le sort d’un sans-papiers risquant la mort. Reste la désagréable impression que l’étranger en danger n’est qu’un ressort de scénario. » C’est Télérama !

Philippe Ridet, dans Le Monde, est beaucoup plus élogieux. Il a écrit ceci dans Le Monde d’hier. « La première gageure de la réalisatrice Anne Fontaine, et qui n’est pas la moindre, est d’avoir transformé la Renault Kangoo, véhicule très utilisé par la police nationale, en théâtre d’un huis clos étouffant mettant aux prises quatre blocs d’humanité brute, soit trois policiers et un prisonnier. Rien de moins gai que cet habitacle qui semble se réduire, que cette suffocation qui nous gagne derrière les fenêtres fermées où défilent les lumières de la ville.

Virginie (Virginie Efira), Aristide (Omar Sy) et Erik (Grégory Gadebois) sont trois policiers d’un commissariat parisien. Leur routine : violences conjugales, infanticides, bagarres de rue. Ils ont leurs secrets, des failles béantes comme des précipices.

Dans Le Monde du 1er septembre

Anne Fontaine a choisi de nous présenter ses personnages dans la routine d’une journée de travail. Le soir venu, nos trois flics aux âmes cabossées se portent volontaires pour se charger du transfert d’un migrant d’origine tadjike, Tohirov (Payman Maadi), d’un centre de rétention en flammes à l’aéroport de Roissy d’où il doit être expulsé.

Jamais le trajet de Paris à Roissy, avec détour par la banlieue nord, n’a semblé si riche en péripéties. Les changements de conducteur rythment ce voyage nocturne, comme dans un film de John Ford avec des diligences. Le casting s’avère parfait. Il fallait des acteurs et une actrice non seulement capables de produire de la lumière, mais physiquement capables d’occuper un volume, dans ce Kangoo où ils se confrontent à leur vérité, à leurs limites. Tous y parviennent haut la main. »

J’irai voir le film, bien entendu. Je ne sais pas ce qu’en pense Hugo Boris. Fidèle lecteur de ce blog, peut-être me le dira-t-il ? En attendant, je vais lire « Le courage des autres », le dernier livre d’Hugo Boris, sorti en janvier, que l’éditeur Grasset présente en ces termes : « Hugo Boris vient de passer sa ceinture noire de karaté lorsqu’il fait face à une altercation dans le RER. Sidéré, incapable d’intervenir, il se contente de tirer la sonnette d’alarme. L’épisode révèle une peur profonde, mélange d’impuissance et de timidité au quotidien. Trait de caractère personnel ou difficulté universelle à affronter l’autre en société ? Ce manque de courage l’obsède. Sa femme lui suggère de « se faire casser la gueule une bonne fois pour toutes » pour l’exorciser.

Mais Hugo Boris est écrivain, alors, pendant quinze ans, il consigne sur le vif ces situations d’effroi dans les transports en commun. Il peint aussi le ravissement d’une rencontre, l’humanité d’un dialogue, l’humour d’un échange imprévu. À travers ces miscellanées heureuses ou tragiques, il décrypte une mythologie contemporaine, celle du métro et du RER, et cherche à appréhender ses craintes, à la maîtriser par la distance, la littérature ou… la lecture de Dragon Magazine !

Il tente aussi de conjurer sa peur en guettant le courage des autres sous toutes ses formes, profondément admiratif de tous ceux qui parviennent à intervenir lorsqu’une situation les interpelle, les sollicite, exige une prise de parole, un geste. Il dessine un hommage à tous ceux qu’il a vu avoir, sous ses yeux, le cran qui lui manquait. Et se demande si le courage est contagieux.

Totalement original, sincère, d’une actualité, d’une précision d’écriture et d’observation remarquables, ce recueil de textes brefs touche au plus juste. En se mettant à nu, Hugo Boris parle de chacun de nous, de nos lâchetés et de nos malaises quotidiens, de nos éblouissements et, parfois, de nos héroïsmes.

Je ne sais pas si le passé est souvent imprévisible, mais je suis sûr qu’il met toujours les événements en perspective et aident à comprendre l’actualité.


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