L’univers impitoyable du capitalisme


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Je ne sais pas s’il est vrai que l’argent rend fou, mais il devient chaque jour plus évident que le capitalisme mondial prend une tournure inquiétante. C’est incontestablement un modèle économique efficace qui a apporté la croissance et la prospérité. Le communisme ayant échoué, il s’est généralisé à l’ensemble de la planète, n’est concurrencé par aucun autre système et s’est remarquablement organisé jusqu’à prendre le pas sur les régimes politiques. On estime à 300 millions, le nombre d’actionnaires dans le monde ; 50% environ sont aux Etats-Unis et 25% en Europe et au Japon. Un américain sur deux est actionnaire et un Français sur quatre pour parler de ce qui nous touche de près. Cette population aisée, 5% de la population mondiale, confie, en général, ses intérêts à des gestionnaires d’actifs qui se livrent une concurrence farouche et rivalisent d’imagination pour offrir à leurs clients les meilleures performances. C’est ainsi qu’une norme de 15% de rentabilité des fonds propres investis s’est imposée. Avec un taux de croissance mondiale moyen de l’ordre de 3% l’an, le système devient fou. Ces deux chiffres, Jean Peyrelevade l’explique magistralement dans son dernier ouvrage « le capitalisme total », sont incompatibles et ne seront pas soutenables dans la durée.
Le système devient fou également sur le plan social. La course au profit ne tient aucun compte de l’intérêt général, des dégâts écologiques, de l’avenir de la planète, des inégalités sociales, du choc des civilisations et de l’épuisement des sources d’énergie. Le système, et ses représentants, qui constituent une nouvelle race de chefs d’entreprise aussi fortunés que les grands joueurs de golf, de football ou les pilotes de formule 1, ne se sentent responsables que d’une seule mission : poursuivre, quelqu’en soit le prix, une rentabilité des fonds propres de 15% ….ou changer d’ entreprise ! Le capitalisme, incarné par les grandes figures comme Ford, Wendel, Krupp, Renault, les 200 familles, était critiquable et critiqué. Aujourd’hui, il est devenu beaucoup plus anonyme, discret, pour ne pas dire abstrait. Il est donc à peu près certain que si le système ne s’impose pas, de lui-même, une régulation suffisante, il explosera un jour ou l’autre. La question n’est pas de savoir s’il explosera ou non, mais quand il explosera.
Avec de tels objectifs, de tels chefs d’entreprises, l’état d’esprit des salariés a profondément changé. Il est devenu violent, méfiant, dépourvu de tout civisme et de nature totalitaire au sens propre du terme. La prolifération des mercenaires accompagne cette diabolique évolution. C’est donc aux politiques et à la communauté internationale d’imposer la régulation qui ne se fera pas d’elle-même. Les tentatives de développement durable, les agence de notation sociale, les projets de taxes (Tobin et autres), vont dans le bon sens mais n’ont aucune chance d’endiguer la puissante dynamique capitaliste. Cette régulation sera d’autant plus difficile à imaginer et à appliquer que le système, par ses contradictions, a fabriqué un nouvel « homo mundus » qui est à la fois salarié, épargnant en assurance vie, actionnaire, et consommateur de produits très bon marché fabriqués en Chine. Pour gérer ses contradictions, cet homme nouveau est devenu très individualiste et adepte du capitalisme. Il sait que les riches deviennent de plus en plus riches et les pauvres, de plus en plus pauvres, mais il n’y peut rien, ne s’en sent pas responsable, et de toutes façons, il n’existe aucun modèle économique de remplacement.
L’avenir du capitalisme relève de la sismographie….


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