La Folle Journée ou le Mariage de Figaro


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Les ouvriers mettent ces jours-ci la dernière main à la restauration du théâtre de l’Odéon. Il faut souhaiter que la programmation n’ait pas l’impertinence, en cette période de fin de règne, d’inaugurer le nouveau Théâtre Français avec une pièce qui provoque une émeute et qui ait des conséquences analogues à ce qui s’est passé le 27 avril 1784.
Que s’est-il donc passé ce jour là ?
Relisons avec le même bonheur ce que Claude Manceron a écrit dans le troisième tome des « Hommes de la liberté » – Le bon plaisir. « Louis XVI a cédé ; on va présenter La Folle Journée ou le Mariage de Figaro. Qui, on ? Les Comédiens français. Devant qui ? Tout Versailles et tout Paris, moins le Roi et la Reine. Ils ne sont pas là pour la radieuse envolée de la pièce de Beaumarchais, la plus hardie et la plus prophétique de l’histoire contemporaine. Le 27 avril 1784, « au flanc de la haute colline ou de la petite montagne qui se lève sur la rive gauche de la Seine, déjà presque aux lisières de Paris ? Une sédition ? Un carnaval ? Paris bouge. Rassurons-nous : ce n’est que pour une comédie. Encore que…Folle journée pour « La Folle Journée ». Dès le matin, une foule énorme se presse dans la boue, devant la façade du nouveau Théâtre Français, pour retenir les places, et pourtant le rideau ne se lèvera qu’à cinq heures et demie du soir, quand on aura allumé les quinquets. De gentilshommes à cordon bleu sont coudoyés par les petits savoyards. Dès onze heures du matin, on dirait une émeute : la foule s’étend jusqu’à l’enceinte du Luxembourg et obstrue la rue qui descend à la Seine. Les portes sont enfoncées, la garde dispersée et les grilles tordues par la pression des assaillants. La plupart des grandes dames se sont installées dans les loges des actrices et y dînent en attendant le spectacle, pour être sûres d’avoir une place. On relève trois morts par étouffement, après la bagarre finale qui laisse dehors quatre candidats sur cinq. Cela se passe autour de ce petit palais tout blanc, encore mal dégagé de la glaise de son chantier, que le comte de Provence vient de faire construire pour les Comédiens français, afin d’avoir lui aussi, comme les Orléans avaient l’Opéra, un théâtre à la porte de sa demeure du Luxembourg. Le futur Odéon est encore un peu isolé, dans ce quartier en plein remaniement qui est en train de prendre son visage définitif, entre le Luxembourg et le palais Mazarin. A deux pas de là, sur la colline Sainte-Geneviève, on met la dernière main à la construction d’une église géante, dédiée à la patronne de Paris, empreinte du style néo-antique qui va partout fleurir à Paris. Comme la ville change ! »
Arrêtons-nous là, car la suite ( page 323) évoque « une forme de spéculation qui vient de naître : la construction immobilière, au profit exclusif des nantis. » Ce serait trop pour aujourd’hui !


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