François Gabart et la confiance en soi.


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Voici le troisième et dernier article que je consacre à l’exploit de ces deux brillants ingénieurs qui font honneur à notre pays et, surtout, symbolisent la France qui gagne en ces temps de morosité.

François Gabart, toujours en tête, était donc attendu aux Sables d’Olonne le dimanche 27 janvier. Il voyait Armel Le Cléac’h se rapprocher. Le « chacal » était désormais à moins de 100 milles et ne lâchait rien. C’est sa force.

Attendue de puis si longtemps, la libération de Florence Cassez fut un soulagement. Son retour à Paris, où elle fut accueillie comme un chef d’Etat, laissa perplexe. Perdrait-on le sens de la mesure et du ridicule ? Plus sérieux et lourd de conséquences, apparut l’engagement de David Cameron d’organiser un référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne, s’il gagne les élections législatives de 2015. Est-ce un coup de bluff, un coup de poker pour gagner ces élections ? Probablement disent les spécialistes. C’est cousu « aux câbles d’abordage », pour rester dans le domaine de la voile.

François Gabart approche des Sable- d’Olonne

Grâce à un contournement assez court des Açores, François Gabart a repris de l’avance sur son poursuivant. Vendredi 25 janvier, François Gabart et Armel le Cléac’h  étaient à moins de 1.000 milles des Sables d’Olonne. Le lendemain matin, les deux monocoques commençaient à «arrondir» leur route à l’est, vers le golfe de Gascogne et les côtes françaises.

Le dimanche 27 janvier à 5 heures du matin, François Gabart n’était plus qu’à 117 milles de l’arrivée. A 18,6 nœuds, il était prévu qu’il coupe la ligne au niveau de la bouée Nouch Sud en fin de matinée. C’est à peu près ce qui se produisit. Le skipper de Macif a franchi la ligne d’arrivée à 15h18 Il a alors  attendu la marée haute pour entrer dans le chenal des Sables d’Olonne où une foule immense l’attendait depuis le petit matin pour l’acclamer. A quoi penser le jeune Charentais pendant ces heures qui devaient lui paraître d’autant plus longues que, pour lui, la compétition était terminée et bien terminée ? A peu près inconnu du grand public, il entrait dans le chenal comme dans le Panthéon de la voile et du sport français

L’exceptionnelle confiance en soi dont il avait preuve pendant toute la course se lisait sur le visage de ce jeune homme blond, souriant, serein, rasé de près, fière mais sans exubérance, debout à l’avant de son bateau. François Gabart avait eu le temps de se préparer à recevoir l’hommage de la foule agglutinée le long du chenal et des bateaux habilités à l’escorter, mais lui qui avait tout prévu, anticipé, fut tout d’un coup bouleversé par l’Ave Maria de Franz Schubert. Les nerfs, enfin, se relâcher. Les amateurs de voile découvrait un nouveau type de navigateur, à la fois sportif de haut niveau, diplômé d’une grande école, instinctif, mais rationnel, bon communicateur et décontracté comme s’il venait, simplement, de participer aux « Voiles de Saint-Tropez ».

Ces premiers mots furent pour rendre hommage à son copain. «Je voulais remercier Armel. Sans lui, mon Vendée n’aurait pas été aussi exceptionnel.» Ensuite seulement, il parla de lui : «On découvre des choses sur soi. Je ne pensais pas que j’avais cette énergie là pour répondre à l’enchaînement des problèmes. Et puis il ne faut pas s’inquiéter de faire des erreurs. On est des humains» (…) «Je suis quelqu’un de positif dans la vie. Quand on se plaint tout le temps, les ennuis restent avec toi.» A aucun moment, il n’avait dévoilé la moindre fragilité. Armel Le Cléac’h, trois heures plus tard, reconnaissait qu’il était bluffé « J’ai été surpris qu’il ait fait si peu d’erreurs, qu’il ait toujours été rapide, qu’il n’ait jamais eu de coup de mou, en tout cas, ça ne se voyait pas de l’extérieur. On se disait : « C’est pas possible, il lâche pas le morceau ! » Puis quand j’étais devant dans les portes du Sud, je pensais qu’il allait décrocher à un moment, mais il revenait, encore et encore. Ça a été une superbe bagarre. « 

Le Vendée Globe 2012 se termine

Après ces quelques réflexions psychologiques et philosophiques, vint l’analyse technique. Evidemment, il avait eu des problèmes, sans arrêt, chaque jour. C’est ainsi que le 6e jour, la pompe à injection de son hydrogénérateur de secours, une turbine permettant de faire de l’électricité avec le déplacement de l’eau et du bateau, s’était cassée. Il avait fait le choix de se taire.  » Je voulais à l’origine partager mes problèmes mais vu que j’étais totalement dans la course, j’ai gardé ça pour moi. Quand on a commencé à se bagarrer dans l’Indien avec Armel, c’est devenu de la pure compétition. Et pendant trois mois, je n’ai rien lâché. Je ne pensais pas que j’avais cette énergie-là et je ne pensais pas que j’étais capable de supporter tout ça. Chaque jour, tu penses avoir vécu le pire et tu ne veux pas que ça se reproduise mais ça revient le lendemain et ainsi de suite « ,

Les meilleurs spécialistes ajoutaient : «François a toujours navigué à deux nœuds de plus qu’Armel, qui a pourtant plus d’expérience que lui. Son insouciance l’a désinhibé, contrairement aux autres « vieux » skippeurs, qui n’ont pas pris de risques pour être sûrs de terminer la course ». Pour dominer ses concurrents, lui, n’a pas besoin de « zlataner », en référence au suédois qui fait tant parler de lui actuellement.

Pendant qu’aux Sables-d’Olonne on refaisait la course, d’autres marchaient de Denfert-Rochereau à La Bastille pour manifester leur soutien au « mariage pour tous ». Les chaînes d’info, notamment BFM-TV et I-Télé avaient fait leur choix : L’arrivée du Vendée Globe s’imposait. Des internautes furieux se déchaînèrent alors sur Twitter pour crier leur colère. Français Gabart, pourtant adepte de ce réseau social, en l’apprenant à dû prendre conscience qu’il était revenu sur terre, une terre où il faudra qu’il fasse preuve d’autant de patience, de mesure et d’intelligence que sur la mer.


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