Une Journée de l’Europe particulière.


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À quelques heures d’intervalle, le totalitarisme et la démocratie, se sont affrontés par discours interposés, le 9 mai 2022.

Vladimir Poutine, ce matin, entouré de ses généraux, face à la place Rouge, a célébré le 77anniversaire de la victoire soviétique lors de la Seconde Guerre mondiale. Se référant à plusieurs reprises à l’héroïsme des soldats soviétiques lors de la Grande Guerre patriotique de 1941-1945, le président russe a fait le parallèle avec ce qui se passe en Ukraine. « Aujourd’hui comme hier, vous vous battez pour notre peuple dans le Donbass, pour la sécurité de notre patrie, la Russie, pour qu’il n’y ait pas de place dans le monde pour les bourreaux et les nazis. » Il a affirmé que la Russie avait « tout fait » pour éviter la confrontation avec l’Occident, « Les pays de l’OTAN n’ont pas voulu nous entendre, ils avaient des plans complètement différents. Une invasion de nos terres historiques, y compris de la Crimée, se préparait ouvertement. Tout indiquait qu’un affrontement avec les néonazis serait inévitable. La Russie a repoussé préventivement l’agression. C’était une décision nécessaire et prise à temps, la seule possible pour un pays souverain, fort et indépendant. La Russie était face à une menace inacceptable. » Vladimir Poutine a prévenu qu’il fallait « tout faire pour que l’horreur d’une guerre mondiale ne se reproduise pas ». Un message au reste du monde, notamment, aux démocraties occidentales, qualifiées de « néonazis. »

Peu avant 14 heures, Emmanuel Macron a prononcé un discours très attendu devant le Parlement européen, réuni à Strasbourg, à l’occasion de la présentation des conclusions de la Conférence sur l’avenir de l’Europe.

À cette occasion, le chef de l’État a fait l’éloge de la démocratie et présenté sa vision de l’avenir de l’Europe. « L’Ukraine, pour lui, par son combat et son courage, est d’ores et déjà membre de cœur de notre Europe, de notre famille, de notre union. Mais même si nous lui accordions demain le statut de candidat (…) à l’adhésion (…), nous savons tous parfaitement que le processus (…) prendrait plusieurs années, en vérité sans doute plusieurs décennies, sauf à ce que nous décidions de baisser les standards de cette adhésion et donc de complètement repenser l’unité de notre Europe, et parfois les principes au nom desquels nous sommes exigeants à l’égard de certains de nos propres membres. Et nous y tenons tous.

Emmanuel Macron s’interroge : « Comment organiser l’Europe d’un point de vue politique et plus large que l’Union européenne ? » Il souhaite la création d’une « communauté politique européenne », une proposition que François Mitterrand avait déjà faite en son temps. Selon lui, cette communauté « permettrait aux nations européennes démocratiques adhérant à notre socle de valeurs de trouver un nouvel espace de coopération politique, de sécurité, de coopération en matière énergétique, de transports, d’investissements d’infrastructures, de circulations de personnes, en particulier de notre jeunesse ». « La rejoindre ne préjuge pas d’adhésion future à l’Union européenne. Comme elle ne serait pas forcément fermée à ceux qui ont quitté cette dernière. » « Il faut rassembler notre Europe dans la vérité de sa géographie avec la volonté de préserver l’unité de notre continent », a-t-il conclu sous les applaudissements des députés européens.

Pour Emmanuel Macron, « l’Union européenne, compte tenu de son niveau d’intégration et d’ambition, ne peut pas être à court terme le seul moyen de structurer le continent européen ». Il se défend de promouvoir une « Europe à plusieurs vitesses », mais il défend en revanche le principe d’une « différenciation ouverte à tous et fidèle à notre histoire et aux ambitions portées par les fondateurs » de l’Europe.

Le président français s’est dit « favorable » à une révision des traités. Il souhaite ainsi que soit convoquée « une convention de révision des traités » dès le mois de juin. « C’est une proposition du Parlement européen et je l’approuve », a-t-il lancé sous les applaudissements des eurodéputés. Le chef de l’État souhaite notamment « généraliser le vote à la majorité qualifiée dans nos décisions pour nos principales politiques publiques » et « clarifier nos objectifs tels que le climat, le plein-emploi, la croissance, la justice sociale ». M. Macron propose aussi de renforcer « la légitimité du contrôle démocratique » en revoyant « les règles des élections européennes » ou « les droits d’initiative au Parlement ».

Le président a beaucoup insisté sur « l’indépendance et l’efficacité » de l’Union européenne : La pandémie, la guerre nous ont montré nos vulnérabilités et le risque que nous ne répondions pas assez vite et assez fort à ces dépendances aggravées. Il s’agit notamment d’« investir encore plus fort » dans la défense, se préparer aux « nouvelles formes de conflictualité », et défendre le « flanc oriental » de l’Union.

L’Europe est un modèle, un exemple, un laboratoire de la démocratie, mais les peurs, les conséquences du désordre économique et social, sont telles, que la solidarité dont l’Europe a fait preuve pour le plan de relance, l’obtention de vaccins et le soutien à l’Ukraine, aujourd’hui, n’apparaît pas suffisante pour mettre l’Europe à l’abri d’un accident de l’histoire qui pourrait conduire à sa disparition. De nombreux Européens sont tiraillés entre l’esprit européen qui les anime et la tentation illibérale et populiste qui leur est proposée par d’incorrigibles nationalistes qui apportent souvent de mauvaises réponses à de bonnes questions. La Hongrie, qui vient de renouveler sa confiance en Victor Orban, en est le plus récent exemple.

« L’Europe : l’être ou le néant ? », titre que nous avions retenu, Jean-Paul Benoit et moi, pour le livre d’entretiens que nous avons publié en mai 2019, exprimait à la fois l’espoir que suscite la construction européenne et les menaces qui pèsent en permanence sur elle.

Le 9 mai 2019, j’écrivais, dans ce blog, que l’Union européenne subissait une attaque de grande envergure. Son modèle démocratique, son poids économique, gêne ceux qui s’emploient à organiser de nouvelles zones d’influence autour de la Chine, des États-Unis, de l’Inde, de la Russie. Si l’Europe reste dans cette situation inachevée, elle perdra l’influence qu’elle a encore, et qu’elle doit avoir, compte tenu de son poids économique dans le monde. Elle pourrait même sortir de l’Histoire.

Aujourd’hui, les Européens ont l’impression d’être dans une lessiveuse. Terrorisés par les menaces apocalyptiques de Vladimir Poutine, destinées à les intimider, et par la puissance protectrice des États Unis, apparemment décidés à « affaiblir » la Russie, mais dont les objectifs ne sont pas toujours les nôtres, avec les risques d’escalade que comporte cette posture, ils prennent la mesure de leur impuissance, de leur vulnérabilité, de la faiblesse de leur défense et de leur dépendance.

Comment, dans ces conditions, l’Europe peut-elle s’imposer dans la recherche d’une solution négociée, être la puissance d’équilibre, capable de faire preuve d’imagination et de diplomatie éclairée ? C’est très difficile. Emmanuel Macron, l’Européen, fait, depuis son accession au pouvoir, tout ce qu’il peut pour jouer ce rôle avec patience, persévérance et la distance qu’il convient par rapport aux parties prenantes au conflit. Les résultats ne sont pas là, parce que les États membres n’ont jamais eu la volonté de doter l’Europe des attributs de la puissance. L’euro, c’est bien, mais ce n’est pas suffisant. L’Allemagne, avec sa politique pacifiste, égoïste, à courte vue, uniquement économique, porte, nous l’avions écrit, une lourde responsabilité à cet égard. Faute d’avoir pris, en temps utile, les décisions qu’il aurait fallu prendre, pour être indépendante, autonome stratégiquement, être une puissance d’équilibre, capable de jouer un rôle dans la reconstruction d’un monde en paix, l’Union européenne, en cette Journée de l’Europe du 9 mai 2022, est, pour sa sécurité, pour son économie, ballottée comme un bouchon sur la mer.

Dominique Moïsi, dans les Échos, daté du 1er mai et sur le site de l’Institut Montaigne, pense que « le président français dispose de cartes non négligeables, au point que l’on pourrait parler de « moment Macron ». N’est-il pas, depuis le départ d’Angela Merkel, le leader naturel de l’Europe, un statut renforcé par sa réélection et l’absence d’alternative ? Les premiers pas du chancelier Olaf Scholz ont été timides. Son partenaire privilégié, Mario Draghi, sera-t-il encore aux affaires dans un an, après les élections législatives de 2023 ? De l’autre côté de la Manche Boris Johnson n’a survécu au scandale du « Party Gate » (mais pour combien de temps ?) que grâce à l’invasion de l’Ukraine par Poutine. La nature a horreur du vide et Emmanuel Macron n’a pas plus de rival en Europe, qu’il n’en a eu véritablement sur le plan interne.

À l’heure de la guerre en Ukraine, l’histoire donne plus que jamais du sens à la vision d’Emmanuel Macron, d’une Europe puissance disposant d’une autonomie stratégique. Pour autant, trois écueils sont à éviter. Le premier serait d’entretenir l’illusion que la France a un rôle d’intermédiaire privilégié à jouer avec Moscou. Au lendemain des attaques perpétrées par un membre permanent du Conseil de sécurité contre Kyiv, au moment même où s’y trouvait le secrétaire général de l’ONU, il est clair qu’il n’y a rien à attendre de Poutine. Toute autre lecture ferait preuve de naïveté ou d’orgueil. À l’inverse, et c’est le deuxième écueil, il convient de ne pas encourager une escalade verbale irresponsable avec Moscou, comme semblent avoir tendance à le faire Londres et Washington. Aider massivement l’Ukraine, sanctionner autant que faire se peut la Russie sont des réponses légitimes et nécessaires à l’heure des révélations toujours plus nombreuses sur les crimes de guerre commis par l’armée russe. Pour autant, déclarer que notre objectif affiché est la « dépoutinisation » de la Russie, ne peut qu’encourager les tendances à la radicalisation de Moscou. Il existe une voie médiane entre l’illusion du dialogue et les dangers de la guerre des mots. Une voie que l’on pourrait décrire comme « européenne », qui ne serait ni contraire à l’éthique ni à la realpolitik. L’Élysée a confirmé que, fidèle à la tradition, le président réélu effectuerait son premier voyage officiel à Berlin. Les dirigeants français et allemands devraient de là se rendre à Kyiv, dans un geste d’unité européenne et de solidarité avec l’Ukraine.

Mais, pense Dominique Moïsi, il existe pour le président Macron un troisième écueil. Dans sa volonté de mettre en avant l’autonomie stratégique de l’Europe, le président Français doit intégrer les émotions atlantiques de plus de la moitié des pays membres de l’Union. Et ce d’autant plus que la Finlande et la Suède sont peut-être à la veille de rejoindre l’Otan.

Il convient certes d’intégrer la fragilité quasi structurelle de l’Amérique et en particulier le risque de paralysie qui pourrait la menacer à nouveau au lendemain des élections de mi-mandat de novembre 2022, sinon le danger d’un retour de Donald Trump à la Maison-Blanche en 2024. Mais face à la dérive nationaliste de la Russie de Poutine, et au « risque réel de troisième guerre mondiale » pour reprendre l’avertissement formulé par Sergueï Lavrov, il importe de faire preuve d’unité, de fermeté et de réalisme. Face à Poutine, l’unité du monde occidental est l’une des conditions sine qua non de l’unité de l’Europe.

Virginie Malingre, de son côté, rapporte, en ces termes, dans le journal Le Monde (Bruxelles, bureau européen) les propos tenus par Mario Draghi, le Premier ministre italien, lors de son discours au Parlement européen de Strasbourg, le 3 mai 2022.

La pandémie et la guerre en Ukraine nécessitent que l’Union européenne « bouge » vite, a déclaré Mario Draghi, devant les eurodéputés. Les défis, économique, énergétique, migratoire et sécuritaire, que ce conflit a fait naître exigent une réponse des Vingt-sept à la hauteur, mais il leur faut aussi se préparer aux prochaines crises et mettre l’Europe en ordre de bataille pour y faire face. L’ancien président de la Banque centrale européenne appelle de ses vœux un « fédéralisme pragmatique » qui serait aussi un « fédéralisme des idéaux ». À chaque crise, a-t-il résumé, l’Europe fait un pas supplémentaire vers l’intégration, il lui faut désormais faire un saut plus grand, « accélérer le processus d’intégration », pour se préparer aux bouleversements qui l’attendent. Il souhaite, en matière de défense, la tenue d’une conférence, dans les plus brefs délais, afin que les Européens coordonnent leurs efforts militaires. « Nos dépenses de sécurité sont environ trois fois supérieures à celles de la Russie, mais elles sont réparties en 146 systèmes de défense. Les États-Unis n’en ont que 34 », insiste-t-il. Cet effort doit être accompagné d’une politique étrangère dont les décisions ne seraient plus prises à l’unanimité mais à la majorité qualifiée, a-t-il poursuivi.

Au cours de cette intervention, il s’est dit partisan d’une admission rapide des pays des Balkans occidentaux, ainsi que l’Ukraine, la Moldavie et la Géorgie. « La pleine intégration des pays qui manifestent des aspirations européennes ne représente pas une menace pour le maintien du projet européen, cela fait partie de sa réalisation. Nous voulons que l’Ukraine fasse partie de l’UE et l’ouverture immédiate de négociations d’adhésion avec l’Albanie et la Macédoine du Nord », pour que soit donné « un nouvel élan aux négociations avec » et accordée « la plus grande attention aux aspirations légitimes de la Serbie et du Monténégro, ainsi qu’à la Bosnie-Herzégovine et au Kosovo ».

Pour financer les dépenses liées à la flambée des prix de l’énergie ou à l’aide aux plus modestes que la guerre en Ukraine occasionne aux Vingt-sept, Mario Draghi propose que la Commission s’inspire du mécanisme SURE, mis en place lors de la crise du Covid-19 pour aider les États membres à financer la mise au chômage partiel de milliers de salariés. L’exécutif communautaire a ainsi prêté une centaine de milliards d’euros aux pays qui en avaient besoin, à des conditions intéressantes.

Quant aux investissements que les Européens vont devoir consentir s’ils veulent mettre à niveau leur défense, verdir et numériser leur économie, et assurer leur sécurité énergétique comme alimentaire, Mario Draghi souhaite qu’ils soient, en partie, financés grâce à un nouveau plan de relance européen. Sur le modèle de celui que les Vingt-sept ont mis en place pour faire face aux ravages de la pandémie, il serait alimenté par une dette commune.

Si ce programme ambitieux « nécessite un changement des traités, allons-y, avec courage et confiance », a conclu Mario Draghi, qui n’ignore pas le risque d’une telle démarche, mais sait que le Parlement européen y est favorable. Le Premier ministre italien sait aussi que son discours reprend largement des propositions du président français Emmanuel Macron, avec lequel il a d’ailleurs été en contact avant de le livrer mardi.

Le 9 mai, à Strasbourg, à l’occasion de la remise du rapport final de la Conférence sur l’avenir de l’Europe – une vaste consultation citoyenne –, Emmanuel Macron aura l’occasion de s’exprimer. Et à n’en pas douter, son discours résonnera avec celui du Premier ministre italien. Les deux hommes entretiennent une relation de grande proximité et n’hésitent pas à allier leurs forces quand ils le peuvent. Le 26 novembre 2021, ils ont signé le traité du Quirinal, pour une coopération renforcée entre Rome et Paris. Quelques semaines plus tard, le 23 décembre, ils ont publié une tribune dans le Financial Times pour prôner un changement de stratégie économique et budgétaire au niveau européen.

En effet, l’Europe doit « bouger. »

Le Parlement européen l’y encourage. Est-ce qu’Emmanuel Macron est prêt à mettre en œuvre les recommandations approuvées par la Conférence sur l’avenir de l’Europe qui recommande une révision des traités, un accroissement des pouvoirs du Parlement, le passage du vote à la majorité qualifiée dans le domaine de la politique étrangère, des listes transnationales lors des prochaines élections européennes. La réaction du gouvernement allemand, affaibli par la guerre en Ukraine, plus ouvert à une révision des traités que le précédent, et des États membres de l’Est, est très attendue ?

Il faut « bouger », et vite !

Le ralentissement économique est là, inévitable. Moins de croissance, plus d’inflation, baisse du pouvoir d’achat. La stagflation guette. L’euro décroche, au plus bas depuis vingt ans. La récession aussi, avec son cortège de malheurs.

Vladimir Poutine en profite pour tester la résistance des États membres et des institutions de l’Union européenne. À l’heure de vérité, chacun doit prendre ses responsabilités. Le président russe poursuit sa conquête, avec l’aide des mouvements nationalistes qui n’hésitent pas à se comporter comme des ennemis de l’intérieur quand ils choisissent ce moment pour prôner la « désobéissance » aux règles européennes, alors que la solidarité est, et doit demeurer, la force principale de l’Europe.

Jean-Dominique Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman, dans sa lettre de ce jour, exprime son devoir d’optimisme, en rappelant « que les Européens disposent de tous les atouts pour envisager leur futur avec confiance. Avec ses imperfections l’Europe demeure un pôle de stabilité, de richesses, de solidarités et d’égalité unique au monde. Elle ne doit pas douter de la force de ses accomplissements et du modèle qu’elle incarne, qui attirent tant ses voisins, comme l’Ukraine. Elle doit seulement mesurer l’urgence qu’il y a à les parachever en réussissant son intégration économique et financière et, plus difficile, son unité diplomatique et militaire. Elle peut y parvenir dans le respect des identités nationales. Car le XXIe siècle nous offre à son tour surprises et défis. Ils sont nombreux et immenses : Pandémies, émergence de nouveaux compétiteurs, rivalités nouvelles et maintenant conflit ouvert voulu et décidé froidement par une des dernières dictatures résiduelles en Europe. Ne sous-estimons pas l’enjeu des évènements récents : Les démocraties sont de nouveau en lutte pour défendre leur modèle qui place la personne au cœur de la société. Leurs ennemis sont nombreux et ils n’hésitent plus à user de la force pour tenter de les soumettre. La guerre d’agression russe en est ainsi la plus déroutante, dégoûtante et récente illustration.

C’est pour cette raison qu’elle doit se conclure par la défaite de l’agresseur et que l’Europe entière, avec ses nuances, y contribue déjà et y participera de manière déterminante. La leçon dépassera le seul cadre européen ou occidental. Face aux périls et après bien des désastres, l’Europe a su s’unir. C’est le véritable message du 9 mai que bien peu alors avaient pris au sérieux et que beaucoup avaient critiqué, à l’exception des peuples qui l’ont d’emblée accepté. »

Vive l’Europe ! Vive la Journée de l’Europe !


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