La Journée de l’Europe


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Le 9 mai 1950, à 17 heures, dans le salon de l’Horloge du Quai d’Orsay, devant une salle pleine à craquer, un homme grand et frêle, de sa voix sourde, avec un accent de l’Est lisait une déclaration qui a changé durablement l’histoire de la France et de l’Allemagne, mais aussi l’histoire de l’Europe. Cinq ans seulement s’étaient écoulés depuis la fin des hostilités, depuis la plus horrible des guerres. Le secret avait été bien gardé. Deux ministres seulement étaient dans le coup : René Mayer et René Pleven. Robert Schumann, le ministre des affaires étrangères qui venait de lire cette déclaration, mais aussi Jean Monnet, commissaire général au Plan, Etienne Hirsch, Pierre Uri avaient travaillé d’arrache pied pour aboutir à ce plan qui consistait à proposer la mise en commun des ressources de charbon et d’acier de la France et de l’Allemagne pour commencer à changer les relations entre les deux peuples, entre les hommes et bannir symboliquement tout esprit de domination.. Approuvé par Adenauer, enthousiaste, par l’Américain Dean Acheson, qui ne savait que penser de ce papier, le plan fut très vite approuvé par l’Italie et le Benelux. Les Anglais furent évidemment difficiles à convaincre et le général de Gaulle déclara de ne pas bien comprendre ce « méli-mélo de charbon et d’acier ». Depuis 1986, les chefs d’Etats et de gouvernements ont fait de cette date, qui marqua le début de la construction européenne, la Journée de l’Europe.
Le 9 mai 2000, pour le cinquantième anniversaire de cette date, j’avais invité le vice-président de la Banque Centrale Européenne, Christian Noyer, à faire, à l’Ecole militaire, une conférence sur « le long avenir de l’euro ». Le titre était provocateur. La presse, le même jour, doutait de cet avenir et prédisait des jours sombres pour la monnaie unique.
Aujourd’hui, 9 mai 2006, à l’invitation de Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes qui célébrait la 20ème édition de la Journée de l’Europe , je me suis rendu dans le salon de l’Horloge du Quai d’Orsay. L’Europe est en crise mais l’euro se porte bien, n’en déplaise aux incorrigibles sceptiques. Il vaut aujourd’hui 1 $ 27. J’ai une pensée amicale pour Christian Noyer, maintenant Gouverneur de la Banque de France, qui avait vu juste. Les dirigeants européens, depuis la chute du mur de Berlin, la mondialisation, l’élargissement inconsidéré et le rejet du projet de constitution européenne, ne savent pas comment remettre l’Europe en mouvement et lui donner toute la place qu’elle doit prendre dans la croissance mondiale.
Ou sont aujourd’hui la droiture, la conviction, la volonté et le courage qui animaient les fondateurs ? Crise de l’Europe ou crise des élites ?


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