Des mesures en faveur du logement, enfin !


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Dans son programme, dans ses 60 engagements pour la France, François Hollande avait consacré les 22 et 23éme engagements, au logement. « Je veux construire plus de logements. Dans les zones où les prix sont excessifs, je proposerai d’encadrer par la loi les montants des loyers lors de la première location ou à la relocation. Je mettrai en place pour les jeunes un dispositif de caution solidaire. J’agirai pour que soient construits au cours du quinquennat 2,5 millions de logements intermédiaires, sociaux et étudiants, soit 300 000 de plus que lors du quinquennat précédent, dont 150 000 logements très sociaux, grâce au doublement du plafond du livret A. Je renforcerai la loi SRU, en multipliant par cinq les sanctions qui pèsent sur les communes refusant d’accueillir les ménages aux revenus modestes et moyens. Je porterai à 25% les exigences en matière de construction de logements sociaux et je favoriserai la mixité sociale en imposant une règle des trois tiers bâtis : un tiers de logements sociaux locatifs à loyer modéré, un tiers de logements en accession sociale, un tiers de logements libres. Je mettrai gratuitement à disposition des collectivités locales les terrains de l’Etat qui sont disponibles pour permettre de construire de nouveaux logements dans un délai de cinq ans. »

Le 1er février 2012, le candidat François Hollande avait signé, couvert de farine par une déséquilibrée, le « contrat social pour une nouvelle politique du logement » que la Fondation Abbé Pierre pour le logement des défavorisés proposait aux candidats à la présidence de la République. Ce contrat comportait dix engagements précis parmi lesquels il y avait notamment« l’objectif de 500 000 logements par an durant mon mandat, dont 150 000 logements locatifs vraiment sociaux (hors logements intermédiaires), lancer, dès la 1re année de mon mandat, un plan de conventionnement visant 100 000 logements à loyers accessibles par an dans le parc privé et encadrer les loyers du parc privé.

Dans ce contrat, la Fondation Abbé Pierre rappelait que « les politiques du logement successives n’avaient pas été à la hauteur de cet enjeu de société, voire parfois ont aggravé la situation ; il est devenu capital, pour le bien commun,d’agir autrement et d’amorcer dès 2012 des réformes structurelles et simultanées dans quatre directions : la production de logements, la régulation des marchés, la justice sociale et la mixité urbaine et sociale. Ce contrat social pour une nouvelle politique du logement pose les conditions minimales pour rendre possible ce changement… »

Deux années, et quelques mois, ont passé.

cecile Duflot JDDLa situation atteint un niveau critique. Depuis 2011, la production neuve de logements ne cesse de diminuer. En 2013, les mises en chantier ont atteint leur plus bas niveau depuis plus de dix ans avec 280.000 logements contre 450.000 en 2007. Le nombre des permis de construire, en baisse de plus de 20 % se traduira, en 2015, par une inévitable nouvelle baisse des logements construits. Il n’a été construit que 300 000 logements en 2013 au lieu des 500 000 qui figurent dans l’engagement n°22 du candidat François Hollande.  Le secteur du bâtiment est sinistré, ce qui devrait se traduire en 2014, selon l’Insee, par une perte de 0,4 point de croissance. Alors que les conditions de crédit n’ont jamais été aussi favorables, seulement 272 000 logements ont été mis en chantier au cours des douze derniers mois, selon le ministère du logement, alors que 400 000 habitations avaient été construites en 2011. Les mises en vente de logements neufs ont chuté de près de 20 % au deuxième trimestre, les ventes au détail de logements neufs de 8,9 % par rapport à la même période de 2013 et les mises en vente de 19,3 %. La situation est qualifiée « d’extraordinairement préoccupante » par la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI).

Depuis le début du quinquennat, le gouvernement n’a pas construit ; il a bâti des lois, des décrets, qui faisaient dire au chef de l’Etat et à Jean-Marc Ayrault, que Cécile Duflot « faisait un travail formidable », mais il n’a rien fait pour réduire la pénurie de logements, principale cause de la crise du logement.

Adepte du parler vrai, le Premier ministre Manuel Valls a convaincu le chef de l’Etat que pour améliorer la croissance et loger les Français, il fallait faire du logement une réelle priorité. Le Premier ministre est réaliste et ne mâche pas ses mots. Pour lui, la responsabilité de cette situation appartient en grande partie à l’ancienne ministre du Logement qui n’a pas soutenu le secteur du BTP comme elle aurait dû le faire. Le Canard Enchaîné rapporte des propos sévères tenus en privé par le PM : « Duflot s’est contentée de faire beaucoup de démagogie dans la gestion des rapports entre propriétaires et locataires, sans se consacrer au soutien de la construction« .

Manuel Valls, Ségolène Royal et Sylvie Pinel le 29 août 2014
Manuel Valls, Ségolène Royal et Sylvie Pinel le 29 août 2014

Très critiquée, Cécile Duflot feint de ne pas comprendre ce qu’on lui reproche. « Abroger la loi Alur, dit-elle, reviendrait à trahir des engagements de campagne sans aucun effet positif sur la construction ». L’ancienne ministre rappelle que « la crise et l’effondrement des constructions datent de début 2008, avant la victoire de François Hollande et avant que la loi Alur soit évoquée ». Dans un entretien aux Echos du 23 juillet, elle déclarait :  » Le prix de l’immobilier français est insoutenable « , et  » les aides, qu’il s’agisse du prêt à taux zéro appliqué à l’immobilier ancien ou de la défiscalisation du locatif neuf, sont inflationnistes. On a sur-subventionné le secteur du logement pendant des années (…) La loi ALUR permettra d’en finir avec les effets de rente qui maintiennent ces prix élevés « .

Dans son livre : « De l’intérieur. Voyage au pays de la désillusion », édition Fayard, Cécile Duflot dit avoir découvert « l’ampleur des lobbies » et « que le président de la République lui-même n’était pas insensible aux sirènes de ces lobbies ». C’est toujours la faute des autres…

Aussitôt après avoir entendu le Premier ministre annoncer le, vendredi 29 août, une série de mesures  pour relancer le logement et soutenir le secteur du bâtiment, madame Duflot, s’est dite «  très déçue que Manuel Valls renonce à un engagement fort de la campagne de François Hollande, et a jugé l’abandon de l’encadrement des loyers « inouï » et « antidémocratique ». La secrétaire générale d’EELV, Emmanuelle Cosse, quant à elle, parle de « pur scandale ».

Par-delà les postures et le toupet, c’est avoir mauvaise mémoire.

En son temps, le candidat Mitterrand avait dit que, s’il était élu, le locataire serait mieux protégé dans ses relations avec son bailleur. La loi Quilliot donna lieu à un débat mémorable. Il faut dire que pour une rupture, c’était une rupture. Elle stipulait que, dans les périodes de crise, quand la demande est supérieure à l’offre, le locataire doit être protégé contre les agissements du propriétaire, les augmentations de loyers abusives, les clauses potestatives et l’expulsion. Noble sentiment, rééquilibrage certainement nécessaire, mais, venant après le blocage des loyers du gouvernement Barre, cette loi provoqua très vite le retrait des investisseurs et une chute brutale de la construction de logements locatifs privés. Résultat, cette décision, et quelques autres, se traduisirent par la disparition de 600 000 logements du parc locatif privé et une hausse des loyers en raison de la rareté. C’est cela la politique !

Campagne de pub du ministère du Logement
Campagne de pub du ministère du Logement

Le successeur de Roger Quilliot au ministère du logement, dans le gouvernement de Laurent Fabius, se trouva contraint de remédier aux conséquences – pour ne pas dire aux défauts, des réformes Barre (qui avait bloqué les loyers) et Mauroy. Devant la dégradation du marché locatif, Paul Quilès prit rapidement les premières mesures d’incitation à l’investissement locatif.

Le 11 octobre 1986, Alain Juppé, devant la gravité de la situation, déclara : « Notre première mesure sera d’abroger la loi Quilliot et de revenir à une régulation des loyers non par l’administration mais par le marché. La loi Méhaignerie de défiscalisation visant à relancer l’investissement immobilier locatif, relança effectivement la production de logements.

Roger Quilliot n’était pas Cécile Duflot. Agrégé de grammaire, professeur d’université, spécialiste de Camus, sénateur-maire de Clermont-Ferrand, président de l’Association des maires des grandes villes de France, Roger Quilliot aimait avant tout agir et bâtir. Je n’ai trouvé, dans les archives, aucune déclaration de sa part quand survint le changement de politique et son remplacement par Roger Quilès.

            Mais revenons aux mesures annoncées par Manuel Valls le 29 août. Après les « bons sentiments » de madame Duflot, une série de dispositions destinées à relancer le secteur du bâtiment est-elle suffisante pour constituer une politique du logement digne de ce nom ? A l’évidence, non. Certes, il y a urgence, le bâtiment est un des moteurs de l’économie française. Il entraîne de nombreux secteurs d’activité et des dizaines de milliers d’emplois, comme le rappelle Manuel Valls ; la part du bâtiment dans la croissance économique est très importante, mais c’est l’ensemble de la politique du logement qui est à redéfinir. La confiance va revenir, c’est déjà bien ! Mais ce ne peut être qu’un début. J’y reviendrai dans un prochain article.

 


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